• 01/09/2018
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L’éducation thérapeutique du patient : le programme lombalgie chronique

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Apprendre aux patients à vivre au mieux avec une maladie chronique, tel est l’objectif des établissements sanitaires de la Fondation qui ont mis en place des programmes d’éducation thérapeutique. Ce mois-ci, focus sur l’action menée par le CRRF André Lalande à Noth (Creuse).

« Tu me dis, j'oublie. Tu m'enseignes, je me souviens. Tu m'impliques, j'apprends. »

Le docteur Vimont, coordonnateur de deux des trois programmes d’éducation thérapeutique du patient (ETP)1 mis en place à Noth, aime citer cette formule de Benjamin Franklin pour faire comprendre la démarche. « L’ETP accorde une place prépondérante au patient en tant qu’acteur de sa santé, explique-t-il. Il s’agit de lui apprendre à mieux gérer sa maladie. Pour cela, nous l’aidons à acquérir des compétences d’autosoins et d’adaptation aux situations, lui permettant de maintenir ou d’améliorer sa qualité de vie. »

C’est la loi de 20092 qui a officiellement formalisé les programmes d’ETP en France. Ceux-ci comportent différentes phases :

  • la réalisation d’un diagnostic éducatif qui permet d’identifier les besoins du patient, sa motivation, ses difficultés ;
  • la définition d’un programme personnalisé d’ETP avec des priorités d’apprentissage ;
  • la mise en œuvre de séances d’ETP individuelles ou collectives ;
  • l’évaluation des compétences acquises. La particularité de l’éducation thérapeutique, c’est aussi qu’elle mobilise autour du patient une équipe pluridisciplinaire.

La composition de cette équipe est fonction de la maladie et des traitements qu’elle demande. Peuvent en faire partie des médecins, infirmiers, psychologues, diététiciens, pharmaciens, éducateurs en activité physique adaptée, kinésithérapeutes, ergothérapeutes, assistantes sociales… Tous doivent avoir suivi une formation qualifiante de 40 heures minimum.

Aujourd’hui, des programmes d’éducation thérapeutique existent pour de nombreuses maladies chroniques.

Le programme pour le patient lombalgique chronique à Noth

Parmi les programmes mis en œuvre à la Fondation, celui du CRRF André Lalande pour les patients souffrant de lombalgies chroniques existe depuis cinq ans. Selon l’Observatoire du mouvement, la fréquence des lombalgies ne cesse de croître dans les pays occidentaux. La lombalgie représente 6 millions de consultations par an. Le coût total est de 2,7 milliards d’euros, soit 1,5% des dépenses de santé. Elle est également la première cause d’accident du travail. C’est un enjeu économique et de santé publique majeur en France.

Le Docteur Vimont explique quels types de patients sont suivis : « Nous prenons en charge des patients souffrant de lombalgies qui ne sont pas dues à une ou des causes particulières, et pour lesquelles il n’existe pas de traitement radical ou spécifique. Ces patients présentent des incapacités physiques importantes, sont souvent en arrêt de travail depuis un certain temps. Leur maladie a contribué à réduire leurs liens sociaux, leurs activités à l’extérieur, et a un retentissement notable sur leur entourage. Ils ne parviennent plus à mener une vie “normale”. Pour ces personnes, le modèle biomédical (lésion, diagnostic, traitement) que l’on utilise habituellement en médecine a montré ses limites. Une approche biopsychosociale est plus adaptée. Elle prend simultanément en considération les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux pouvant contribuer à cette lombalgie. L’évaluation des croyances, attitudes, représentations et des comportements est essentielle. Elle permet de proposer une solution thérapeutique alternative et constitue une des bases de ce programme d’éducation thérapeutique. »

Le CRRF est le seul établissement à proposer ce type de programme dans le Limousin. Les patients sont accueillis en hospitalisation complète ou à temps partiel. « Cela dépend du contenu du programme que l’on va leur proposer, précise le Docteur Vimont. Nous prenons en compte également leur situation géographique et familiale. »

« Mon mal de dos ne doit plus m’empêcher de faire ce que j’ai envie de faire. »

Le programme dure cinq semaines maximum. L’objectif, pour le patient, peut se résumer en une phrase : « mon mal de dos ne doit plus m’empêcher de faire ce que j’ai envie de faire. » Pour cela, les équipes vont s’employer à restaurer ses capacités physiques, fonctionnelles et psychosociales, lui apprendre à gérer et à modifier son comportement vis-à-vis de sa douleur chronique, à élaborer des projets et des stratégies pour surmonter les obstacles, à reprendre une activité professionnelle…

Cinq ateliers jalonnent le parcours du patient. L’atelier « la lombalgie chronique » a pour but de mieux connaître la maladie et de modifier les croyances sur le mal de dos. L’atelier « la douleur chronique » aide les patients à comprendre les mécanismes de la douleur chronique et à leur faire acquérir de bons réflexes de soins. L’atelier « mes représentations sur l’activité physique » permet de lever les fausses croyances sur le sujet.

Bien souvent les patients prennent conscience qu’ils ne doivent pas s’interdire quoi que ce soit et qu’il y a forcément des activités physiques qu’ils sont en mesure de pratiquer. L’atelier « bienfaits de l’activité physique » les aide à s’inscrire dans une dynamique quotidienne active. Et enfin, « mon tremplin vers l’emploi », nouvellement expérimenté au centre, va permettre de les soutenir dans leurs démarches de retour à l’emploi. Ces ateliers sont collectifs et accueillent quatre à six personnes. Ils associent des patients nouvellement arrivés et des patients en fin de programme.

Les seconds peuvent ainsi faire un retour d’expérience sur leurs progrès. Ils sont souvent plus écoutés que les professionnels et apportent espoir, motivation et force aux nouveaux venus. Le programme est difficile physiquement et psychologiquement. L’entraide contribue à la réussite. Des ateliers individuels complètent le programme : séances avec la psychologue, le psychomotricien, l’assistante sociale… Les patients sont invités à expérimenter des activités physiques (vélo, natation, gymnastique douce, tennis, basket…).

En fin de programme, des ateliers de “mise en situation” sont proposés : on expose de façon progressive le patient à des activités redoutées ou abandonnées. Il doit utiliser, parmi les outils acquis, ceux qui lui permettront de mener à bien cette activité. C’est très important notamment dans le cadre de la préparation au retour à l’emploi. Le docteur Vimont souligne : « Le centre accueille beaucoup de personnels soignants victimes de TMS. On les prépare à réaliser des gestes professionnels auxquels ils vont être confrontés : réfection de lit, manutention de personnes… »

Le Docteur Vimont commente les bénéfices de ce programme : « Que ce soit en termes de diminution des appréhensions, de gestion de la maladie (acquisition de compétences d’autosoins et d’adaptation), ou de modifications apportées à son mode de vie, tous les indicateurs sont au vert. Par exemple, l’analyse des questionnaires de suivi après la sortie du programme montre que 78% des patients ayant répondu ont une activité professionnelle contre 48% lors du diagnostic éducatif. » 


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